Il est utile de remarquer que la distinction des parties du discours reste indéterminée et arbitraire dans les meilleurs dictionnaires et les meilleurs ouvrages de référence en grammaire vietnamienne, ce qui devrait nous détourner de ce critère dans le traitement des homographes :
Selon Grammont et al. (1911), Nguyen Hien Le (1952 : 40), la distinction des parties du discours n’est d’aucune utilité pour l’étude du vietnamien. Par contre, les chercheurs animés d’un souci pédagogique doublé d’une volonté de retrouver en vietnamien tout ce qui caractérise les grandes langues de culture arrivent en général à une classification semblable à celle présentée dans les grammaires scolaires du français : onze classes chez Aubaret (1867), treize chez Tran Trong Kim et al. (1945)... Dans les classifications plus récentes et inspirées des tendances nouvelles en linguistique, le nombre des parties du discours varie considérablement. Emeneau (1951) en détermine cinq alors que Honey (1956), Nguyen Kim Than (1963) offrent des inventaires de douze classes. Entre ces deux extrémités, se trouve une large gamme de possibilités de division : six classes chez Uy Ban Khoa Hoc Xa Hoi Viet Nam (1983), huit chez Diep Quang Ban et al. (1991), Ho Le (1992), Hoang Phe (1992), Nguyen Kim Than (1981),[1] neuf chez Nguyen Duc Dan (1980), Dinh Van Duc (1986), dix chez Nguyen Dinh Hoa (1997), onze chez Tran Ngoc Them et al. (1991). Les classifications trop fines s’accompagnent souvent d’un regroupement intermédiaire : ainsi les neuf classes de Dinh Van Duc (1986) se regroupent en trois grandes divisions (les mots pleins, les mots vides et les pronoms). Il y a deux grands groupes chez Diep Quang Ban et al. (1991), trois chez Uy Ban Khoa Hoc Xa Hoi Viet Nam (1983), Ho Le (1992), quatre chez Tran Ngoc Them et al. (1991), Thompson (1965). Ce dernier détermine, rien que pour le groupe des particules, vingt-huit sous-classes.
Les parties du discours sont définies chez les uns par des critères sémantiques,[2] par des critères formels chez les autres.[3] D’autres encore cherchent à combiner les deux critères.[4] Dans ces conditions, il est naturel que les chercheurs accordent difficilement leurs vues. Même ceux qui avancent dans la même voie comme Le Van Ly (1960) et Honey (1956) arrivent aussi souvent à des résultats tout à fait différents. Le cas de không que nous venons d’examiner suffirait à discréditer cette diversité : la même forme pourrait être attribuée à une seule, deux, trois ou quatre parties du discours et ferait autant de vocables ou pas selon que l’auteur accepte ou rejette le critère des parties du discours dans le travail de lemmatisation. Les résultats varient souvent d’une expérience à l’autre, même à l’intérieur d’une doctrine, comme nous avons pu nous en rendre compte en examinant les formes dites pronoms personnels du pluriel (chúng tôi « nous exclusif », chúng ta « nous inclusif »). On peut multiplier aisément ces exemples et obtenir chaque fois une nouvelle insatisfaction.
La diversité des théories, le foisonnement des tendances, la variété des méthodes dans la détermination des parties du discours nous rendent sensible aux faiblesses et aux difficultés de l’entreprise et nous laissent perplexe quant au choix d’une doctrine. Quel que soit le côté vers lequel on se tourne, on peut être certain que ce n’est pas le bon. L’affectation d’un vocable à une classe quelconque demeure toujours aussi problématique que l’existence même de cette classe. [2] Aubaret (1867), Tran Trong Kim (1945).
[3] Le Van Ly (1960), Honey (1956) se basent principalement sur les possibilités combinatoires du mot. Nguyen Tai Can (1975b) se base sur le syntagme. Nguyen Kim Than (1963) utilise les transformations. Dai Xuan Ninh (1978) travaille à partir de la phrase minimale.
[4] Dinh Van Duc (1986).
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